Rubrique : Boissons

Que ce soit en Turquie ou au Liban, l’hiver est officiellement là lorsque les vitrines des salons de thé affichent un écriteau indiquant « Sa(h)lep » (en Turquie) ou « سحلب » (sahlab, dans les pays arabophones). Cette boisson chaude à base de poudre de tubercules d’orchidées est censée aider à lutter contre les petits maux de la saison froide.

salep

L’histoire du salep remonte à l’Antiquité. La forme des tubercules d’orchidées européennes, très évocatrice de testicules, était interprétée comme preuve de leur effet aphrodisiaque. Les Romains préparaient une boisson à base de poudre de tubercules d’orchidées, appelée… « satyrion » ! Le salep est probablement le descendant direct de cette coutume romaine. Sahlab, le mot arabe, vient de l’expression signifiant « testicules de renard ».

Au XVIIe et XVIIIe siècles, le salep était très populaire en Angleterre sous le nom de « saloop » et il y était apprécié pour sa richesse énergétique. L’arrivée du café le fera tomber dans l’oubli. Aujourd’hui, le salep est toujours très populaire au Moyen-Orient. Il est préparé à partir de lait, de sucre et de poudre de tubercules d’orchidées (plusieurs espèces sont utilisées). Dans les salons de thé, ce mélange est maintenu chaud et brassé en permanence dans des machines spéciales.

Le salep est un liquide épais qui cale bien l’estomac… En effet, la poudre de tubercules est très riche en mucilages (une substance très nutritive qui forme une sorte de gel lorsqu’elle est diluée). D’un goût assez neutre, le salep est parfois parfumé avec de l’eau de rose ou de l’eau de fleur d’oranger. Il est servi saupoudré de cannelle.

Les tubercules d’orchidée sont récoltés dans les montagnes d’Anatolie, brièvement blanchis et mis à sécher. Ils sont ensuite broyés pour obtenir une poudre, le salepi, qui sert à la fabrication du salep mais aussi du salepi dondurma, la glace turque typique de la ville de Maras.

La poudre de tubercules a longtemps été utilisée par les médecins comme émollient (pour apaiser les inflammations), ainsi que pour préparer des boissons fortifiantes pour les convalescents ou les enfants. Elle était également emportée sur les bateaux à voile pour servir de nourriture de secours en cas de problème (une dose de 50 g était considérée comme suffisante pour nourrir un homme toute une journée !).

La poudre de tubercules pure est difficile à trouver en Europe. Les orchidées étant menacées de disparition, le gouvernement turc en a interdit l’exportation. Par contre, il est facile de trouver le mélange pour faire du salep/sahlab dans la plupart des épiceries moyen-orientales. Il suffit de rajouter du lait et de faire chauffer le tout en fouettant sans discontinuer sous peine de devoir sérieusement récurer la casserole…

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Rubrique : Fruits & dérivés

La mélasse de grenade est un produit courant de la cuisine moyen-orientale et perse. Son goût fruité et son astringence en font un excellent ingrédient pour les plats sucrés-salés, les vinaigrettes et les marinades.

mélasse de grenade #1 mélasse de grenade #2

La mélasse de grenade est fabriquée à partir du jus d’une certaine variété de grenade très acide. Additionné de sucre et de jus de citron, ce jus est réduit jusqu’à obtention d’un sirop épais et très foncé (à ne pas confondre avec le sirop de grenadine fait à partir de fruits rouges) et qui se conserve très longtemps. On en trouve assez facilement dans les épiceries moyen-orientales.

Du fait de sa saveur acide, sucrée et fruitée à la fois, la mélasse de grenade peut être utilisée comme le vinaigre balsamique : pour faire une vinaigrette, pour mariner de la viande ou du poisson (par exemple avant d’en faire des brochettes), pour faire une sauce caramélisée, etc. Si son côté astringent vous gêne, il est possible de l’adoucir en la mélangeant avec du miel.

En Iran, la mélasse de grenade est très utilisée, en particulier dans un plat emblématique de la cuisine persane, le ragoût de poulet à la sauce noix et grenade (khoresh-e fesenjan ba jujeh). En Turquie, elle entre dans la composition du nirbach.

Cette mélasse peut également être utilisée pour faire une boisson rafraîchissante en la diluant dans de l’eau citronnée (une cuillère à soupe pour un litre de citronnade).

Enfin, les Doudes vous proposent une recette ébouriffante de gâteau à la mélasse de grenade.

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Rubrique : Accompagnements

Le tah digh est la croûte de riz qui se forme au fond du plat lorsqu’on cuit du riz à la manière perse. En Iran, réussir un tah digh croustillant et doré est le B A BA de la cuisinière digne de ce nom.

tah digh

En Iran et dans les pays voisins, il existe de nombreuses manières de cuire le riz. L’une d’entre elles consiste à cuire longuement le riz à l’étouffée après l’avoir brièvement fait bouillir. Avec ce mode de préparation, on obtient un chelow (riz d’accompagnement) ou un polow (riz mélangé à de la viande, des fruits ou des légumes). Au fond du plat se forme alors une croûte délicieuse, le tah digh (prononcez « taa dir »).

Pour préparer un chelow pour 4 personnes

  • 600 g de riz basmati (impérativement)
  • 2 yaourts « à la grecque »
  • une noisette de beurre
  • une pincée de safran
  • sel
  • une poêle antiadhésive à bord haut avec son couvercle étanche (ou similaire)
  • un grand torchon et une épingle à linge

Lavez le riz longuement dans l’eau froide en le frottant entre les doigts, égouttez, répétez cinq ou six fois jusqu’à ce que l’eau de rinçage soir claire. Laisser ensuite tremper le riz dans un grand volume d’eau salée (une cuillerée à soupe par litre) pendant au moins deux heures, idéalement une demi-journée, pour raffermir le riz et le rendre moins collant.

Faites dissoudre le safran dans un fond de verre d’eau bouillante. Mélangez les yaourts avec le beurre fondu, ajoutez deux cuillerées à soupe d’eau safranée, un peu de sel et fouettez le mélange pour obtenir une belle crème jaune.

Faites bouillir un grand volume d’eau salée. Jetez-y le riz égoutté et laissez-le cuire six minutes, ni plus, ni moins. Pendant ce temps, versez le yaourt safrané dans la poêle et, en la faisant tourner, tapissez-en le fond et les bords.

Après les six minutes de cuisson, égouttez le riz. Avec une cuillère, tassez doucement une couche de riz sur le fond et les bords de la poêle (un demi-centimètre d’épaisseur environ). Cette couche formera le tah digh. Disposez le reste du riz sur cette couche de base, sans tasser et en formant un cône. Ensuite, placez le torchon sur le plat, puis le couvercle en serrant bien. Repliez les quatre coins du torchon sur le couvercle et maintenez-les attachés avec l’épingle à linge. Le torchon va absorber la vapeur pour qu’elle ne ruisselle pas sur le riz.

Faites cuire à feu moyennement fort pendant dix minutes, puis à feu très doux pendant 55 minutes. Retirez du feu et laissez reposer cinq minutes. Soulevez le couvercle, enlevez le torchon, retirez quelques cuillerées de riz que vous mettrez à tremper dans le reste de l’eau safranée (il faut suffisamment de riz pour absorber l’eau sans rester gluant).

Pour servir, transvasez le riz dans un plat de service avec une cuillère, sans toucher le tah digh. Mélangez le riz blanc avec le riz safrané. Faites ensuite glisser le tah digh sur une assiette et coupez-le en quartiers avec des ciseaux. Servez le riz et le tah digh ensemble, par exemple avec un khoresh.

NB Une autre manière de servir le chelow consiste simplement à renverser la poêle sur un grand plat de service (bien préparé, le tah digh va se décoller tout seul).

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Rubrique : Épices, condiments & herbes

Les feuilles de shiso sont un élément courant de la cuisine nippone. Leur goût frais, mentholé, presque camphré, relève les sashimi, les nouilles soba, etc. Réduites en poudre, elles parfument et colorent de nombreux aliments japonais.

shiso

Shiso est le nom japonais de la pérille, Perilla frutescens, une plante de la même famille que la menthe, l’origan, la sauge, le romarin, le thym, etc. Ses feuilles ressemblent beaucoup à celles de l’ortie blanche. Il existe de nombreuses variétés de pérille, les plus courantes étant la pérille verte (ao shiso) et la pérille rouge (aka shiso) aux feuilles d’un beau pourpre foncé. Les deux sont comestibles. La pérille rouge sert également à colorer de nombreux aliments japonais : les prunes umeboshi, le gingembre, le daikon (raifort japonais) et d’autres tsukemono (légumes en saumure), etc.

La pérille a la réputation de contribuer à conserver les aliments, en particulier les fruits de mer et la viande (d’où son nom américain, beefsteak plant), et de prévenir ainsi les intoxications alimentaires. Ces propriétés « antiseptiques » restent à démontrer. Néanmoins, les graines et l’huile de pérille sont très utilisées en médecine traditionnelle asiatique, en particulier contre les allergies. Le shiso a également la réputation de stimuler l’appétit.

Les feuilles fraîches de shiso sont assez difficiles à trouver en Europe, à moins d’en planter dans son jardin (la pérille pousse facilement, mais attention de ne pas la confondre avec la pérille de Nankin qui est seulement ornementale). Certaines épiceries japonaises en vendent en petits sachets (des épiceries coréennes aussi, sous le nom de ken nip). On peut les conserver quelques jours au réfrigérateur dans des feuilles de papier absorbant humides, le tout dans une boîte hermétique. Les grands supermarchés asiatiques ont plus souvent du « shiso thaï » dont les feuilles sont pourpres sur une face et vertes sur l’autre. Son goût est plus prononcé que celui de la version japonaise.

Il est assez facile de trouver des produits japonais parfumés au shiso : poudre de feuilles à mettre sur le riz (yukari, au rayon des furikake, ces condiments à saupoudrer sur le riz), sauce soja au shiso, jus de shiso, etc. Essayez et vous deviendrez vite accro au goût frais du shiso.

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Rubrique : Fruits & dérivés

Introduit en Europe à la fin du XVIIIe siècle, le néflier du Japon (Eriobotrya japonica) est cultivé dans les pays méditerranéens pour ses fruits et son bois. La nèfle est un fruit au goût délicat qui reste encore peu connu au-delà du pourtour de la Méditerranée.

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Originaire de Chine mais amélioré par les Japonais, le néflier du Japon appartient à la famille des Rosacées comme un grand nombre d’arbres fruitiers : pommes, poires, cerises, prunes, abricots, pêches, etc. Il ne faut pas le confondre avec le néflier européen (Mespilus germanica) dont les fruits ne sont plus tellement consommés. Le bois de néflier du Japon est recherché par les luthiers.

La nèfle du Japon (également appelée bibasse ou loquat) est de plus en plus couramment présente sur les étals des marchés, en particulier dans le sud de la France. Plus au nord, on la trouve plutôt dans les petites épiceries de quartier tenues par des Nord-Africains (qui ont davantage l’habitude d’en consommer). Pour être goûteuse, la nèfle du Japon doit être très mûre, donc… fragile ! Il est rare d’en trouver de bonnes, elles sont souvent cueillies trop vertes. Une nèfle mûre à point est légèrement tachée de brun.

Arrivée à maturité, la nèfle du Japon se pèle facilement. Une fois ôtés les gros pépins luisants, il reste une chair orange clair, assez juteuse, acidulée mais très rafraîchissante. À la première bouchée, la nèfle est souvent assez décevante pour ceux qui la découvrent : pas assez de goût, pas assez sucrée. Mais, comme pour beaucoup de produits originaires du Japon, cette première impression de fadeur ne doit pas détourner le gourmet. Il faut apprendre à découvrir les délicates saveurs de la nèfle du Japon comme on apprend à découvrir celles du kaki ou du tofu…

Dans la cuisine, la nèfle peut être dégustée crue ou pochée dans un sirop de sucre, mais également en quartiers légèrement dorés dans un peu de beurre qui va en intensifier le goût (c’est l’effet bien connu de la matière grasse qui renforce les saveurs). On peut également en faire de la confiture : comme les pommes, les nèfles sont riches en pectine et permettent de faire une belle gelée. Cette richesse en pectine est également responsable de l’effet légèrement laxatif des nèfles du Japon. À bon entendeur…

Enfin, comme tous les fruits de la famille des Rosacées, les amandes (à l’intérieur des pépins) sont savoureuses mais… toxiques ! N’en consommez jamais de grandes quantités.

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Rubrique : Viandes

Yuzu et miel d’agrume (miel d’oranger ou miel de citronnier) se marient parfaitement pour caraméliser des dés de poulet. Quelques éclats d’amandes peuvent également apporter une légère touche d’amertume finale.

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Pour 2-3 personnes

  • 500 g de blancs de poulet coupés en dés
  • un verre de jus de yuzu
  • 2 grosses cuillerées à soupe bombées de miel d’agrume
  • sel, poivre
  • 50 g d’éclats d’amandes (facultatif)

Faites dorer les dés de poulet dans un peu d’huile à feu vif, dans une poêle antiadhésive. Ajoutez le jus de yuzu et le miel. Mélangez pour faire fondre le miel. Salez, poivrez et laissez cuire les dés dans le jus, toujours à feu vif, en les mélangeant régulièrement.

Petit à petit, le jus réduit et vire au sirop. Dès que le jus prend une consistance de caramel, saupoudrez d’éclats d’amandes, retirez du feu et servez.

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Rubrique : Fruits & dérivés

Yuzu ? Vous avez dit yuzu ? Mais qu’es-aco ? Le yuzu est le nom japonais d’un agrume qui pousse également en Chine (sous le nom de you zi) et en Corée (yuja). Curieux mélange de saveurs citronnées, le yuzu vous ébouriffe les papilles.

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De la taille d’une orange, le yuzu est de couleur vert-jaune et d’aspect bosselé. Ce qui frappe quand on goûte au jus de ce fruit,  c’est sa saveur complexe de mandarine, de citron vert, de pamplemousse, de cédrat… Faites-en goûter à l’aveugle à des amis et vous verrez leur air perplexe pendant qu’ils cherchent de quel agrume il s’agit.

Au Japon, le yuzu entre dans la préparation de nombreux plats (zeste ou jus) et d’une sauce, le ponzu (une sauce de soja parfumée qui change de la bonne vieille shoyu des familles…). En Corée, le yuzu, additionné de sucre et de miel, sert également à préparer une sorte de confiture qui se consomme diluée dans de l’eau chaude : le thé de yuzu (yuja cha) est une boisson d’hiver destinée à renforcer les défenses immunitaires.

En France, il est rare de trouver des yuzus fruits, mais on peut acheter du jus de yuzu, du yuja cha et des produits parfumés au yuzu dans les épiceries japonaises ou coréennes. Que faire avec du jus de yuzu lorsqu’on cuisine à l’occidentale ? À peu près la même chose qu’avec du jus de citron… c’est vaste ! Deux exemples : remplacer le vinaigre dans une vinaigrette, cuisiner des dés de poulet au yuzu et au miel d’agrume.

Si vous passez par Paris et que vous avez les moyens de vous offrir un bon dîner (compter 80 à 100 € par personne), allez manger chez Hissa Takeuchi*, un chef japonais qui est l’apôtre du yuzu en France. Avec son épouse, il a co-écrit un ouvrage sur ce fruit : Le yuzu, Hissa Takeuchi et Elisabeth Paul-Takeuchi, Éditions de l’Épure, 6,50 €.

NB : Sur internet, on peut se procurer de l’huile essentielle de yuzu. Attention, cette huile essentielle est destinée aux soins du corps (bains, etc.), pas à l’alimentation !

* Restaurant Kaiseki, 7 rue André Lefebvre, 75015 Paris, 01 45 54 48 60, www.kaiseki.com

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